Je suis ému et honoré face à ce prix décerné par les libraires de France, gardiens géants de la culture.
Une société en bonne santé est une société où le libraire tient une place aussi importante que celle d’un médecin. On ne peut guérir de la réalité qu’avec le remède de la fiction, comme on ne peut comprendre la vérité qu’avec une part de mensonge. Ainsi, d’une certaine manière, le métier de libraire et celui d’écrivain convergent : l’un donne la lecture pour écrire, l’autre l’écriture pour lire.

Mais cet honneur est plus grand encore, car vous avez choisi ce livre parmi d’autres qui l’auraient mérité aussi. Sur cette liste figuraient des romans pénétrants, inspirants, babéliques. Un tourbillon merveilleux, composé de mille écumes et de mille pages brillantes, où il était difficile de se faire une place. Héritage n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan des publications. Et pourtant, en recevant ce Prix des Libraires, j’ai eu la sensation d’être cette goutte fortunée, chanceuse, qui est soudainement avalée par une coquille, et qui, malgré elle, avec le temps, mêlée à une connivence de sable, devient la perle d’une huitre, au milieu de la mer, le temps d’une année. Voilà pourquoi je vous remercie, amis libraires, d’avoir entouré ce livre de votre nacre.